Frankenstein de Mary Shelley mérite son succès: c'est un roman incontournable!
Le roman de la jeune Mary Shelley, publié en 1817, trouvera un succès retentissant chez les lecteurs et plus tard, par son adaptation cinématographique.
Shelley l'écrit à 19 ans, confinée avec un groupe d'amis écrivains sur les bords du lac Léman à Genève. Lord Byron, célèbre auteur romantique, invite sa compagnie à écrire pour chasser l'ennui car la pluie incessante au dehors les empêche tous de profiter de l'été. Ce roman de renommée internationale n'est autre que le fruit hasardeux d'un défi d'écriture , au cours d'un séjour dans la capitale suisse qui inspirera le cadre du roman.
Victor Frankenstein, fils de bonne famille suisse, vif, fervent scientifique et infatigable étudiant, conduit ses expériences vers la création d'un homme artificiel, à qui il saura insuffler la vie. Mais le jeune savant, à la vue du « démon », du « monstre » tel qu'il le nomme, ne peut supporter sa vue ni la réussite de son entreprise tant la créature inspire la répulsion. Le roman raconte alors le destin étroitement et inéluctablement mêlé de Victor et de sa créature car celle-ci, abandonnée aussitôt qu'elle vit le jour, va faire la douloureuse expérience de la vie; alors elle cherchera, par tous les moyens, à exister et à réclamer une petite chance d'être apaisée, aux dépens du malheureux créateur
Le roman de Mary Shelley est vraiment plaisant, la qualité de l'écriture, même par le filtre de la traduction, se fait sentir et révèle le talent d'écrivain de Shelley, capable d'entraîner le lecteur au coeur des montagnes, des lacs, des côtes irlandaises, du pôle nord, mais aussi au tréfonds des tourments de l'âme: celle de Victor et celle de la créature.
L'oeuvre est éminemment romantique et s'inscrit dans l'esprit anglais de la fin du XVIIIème siècle. Tout dans le roman l'évoque, l'illustre sensiblement. Le personnage de Victor, condamné à subir les conséquences violentes de son expérience extrême, cherche à fuir son destin. Il fait preuve, ainsi que sa créature, d'une sensibilité romantique, entre zèle, exaltation et désespoir profond. L'ensemble de l'oeuvre offre une variété de paysages grandioses et tout à la fois rudes, agités, menaçants, mais splendidement supérieurs à la force humaine. Le parcours physique des personnages, le thème de la fuite et du voyage sont autant d'éléments qui participent à l'esprit romantique et au dynamisme du livre
Si vous cherchez un roman d'épouvante, ne comptez pas vraiment sur celui de Shelley car il ne s'agit pas ici d'effrayer (ou alors, c'est raté!), quand bien même certains passages, je l'avoue, ont suscité chez moi un léger malaise. Shelley semble se questionner davantage sur les progrès de la science; l'oeuvre pourrait aussi , pourquoi pas, se lire comme une métaphore de l'acte d'écrire, comme la naissance d'une oeuvre à travers celle de la créature.
Mais pour moi c'est avant tout un roman passionnant, élégant, reléguant l'amour, la mort, la famille au premier plan, car même la créature en fait l'expérience, elle est comme un miroir inversé de Victor, désirant trouver du réconfort tandis que « son maître » le goûte depuis l'enfance. Il est question d'amitié, de mariage, des relations filiales, y compris entre Victor et son monstre, mais surtout de la vie humaine, de ses douleurs, de ses aspirations, de sa gravité.
J'ai mis un peu de temps à le lire car c'est l'hiver, que mon corps aspire au repos et cependant, malgré ma fatigue, mes mains ont invariablement et sans hésitation ouvert ce livre qui passionne autant qu'il émeut.
Oui, il est véritablement incontournable: reflet d'une époque, roman sensible, oeuvre classique!