Le Diable de Tolstoï..... diabolique?
Je suis tombée sur l'édition folio à 2 euros, et voici que ma main se tend (comme par hasard..) sur Le Diable (extrait) de Léon Tolstoï, oeuvre intégralement publiée en 1911, Le titre est alléchant, et la couverture provocatrice (gros plan sur un sein nu..). J'avoue que ma première pensée n'a pas considéré la possible métaphore. Quand il est question de diable, je brûle de lire le livre en question (au cinéma, même combat). Néanmoins, petite déception à la lecture, Diabolus vade retro, Tolstoï n'en parle pas!
Si la figure tutélaire du Diable dans le titre (de cet extrait, attention) est employée, c'est probablement qu'elle est liée à la notion de tentation, de péché, de perdition passionnelle.
Le personnage,Irteniev, homme besogneux dans une province russe, paysan dans l'âme et soucieux de rétablir les affaires familiales proches de la faillite, réussit bien et dessine un avenir confortable pour lui et sa mère, veuve. Il voit cependant naître en lui des désirs de volupté très forts mais spontanés. Il va désormais s'occuper de trouver une femme qui puisse satisfaire son élan sexuel en attendant mieux. Cette femme qu'il rencontre, nommée Stepanida (mariée!), va devenir une obsession charnelle, bien qu'au début, Irteniev n'en avait pas fait réellement cas.
Vient alors le temps de s'unir religieusement avec une charmante et vertueuse jeune femme, Lise, qui n'est pas celle qui a assouvi les pulsions d'Irteniev... On devine alors le conflit naissant en lui. Il y a d'un côté le mariage, le bonheur d'un ménage innocent... et de l'autre la brûlante Stépanida... Voila où se niche la figure du Diable, dans l'impossibilité de contenir les élans les plus instinctifs, les désirs de jouissance, bien naturels pour l'être humain. Et nous revoici encore et toujours dans le tableau de la condition humaine (c'est souvent le propre de l'univers romanesque), dont Tolstoï est un des peintres et qui brosse, ici, une scène de tentation pathétique qui fait basculer les beaux jours d'un honnête paysan dans les ténèbres de l'insaisissable, des forces intimes qui gouvernent notre esprit, notre coeur... et notre corps. (On retrouve finalement la thématique tragique d'une passion fatale et dévorante... Phèdre n'est pas loin!)