Carmen de Mérimée : un archétype flamboyant du féminin
La nouvelle de 1845 est bien célèbre et l’opéra de Bizet contribuera à rendre cette histoire mythique à travers par exemple « l’amour est un oiseau rebelle », chant lyrique qui évoque Carmen, gitane retorse et sublime jetant son dévolu sur un soldat, Don José, qui accepte de la laisser s’enfuir après qu’elle a taillé la face d’une rivale au couteau.
Carmen est une bohémienne qui porte en elle toutes les beautés et les sauvageries d’un peuple nomade qui reconnaît chacun de ses enfants mais parle toutes les langues et ruse à tout va pour vivre. Mérimée saisit en quelques paragraphes une communauté fascinante, portée par son plus célèbre symbole littéraire : Carmen. Femme associée au démon, emportant l’âme des hommes et jouant de ses charmes, du couteau ou de la voyance pour imposer sa marque, voler et mettre sur pieds les coups les plus noirs, elle détruit et possède le jeune soldat qui deviendra criminel pour être son « rom », autrement dit son époux.
L’écriture de Mérimée donne une couleur et un rythme impeccables à son imaginaire et à son fantasme de la belle andalouse. Esméralda fait pâle figure à côté de ces yeux de gitane qui lance leur lueur comme une arbalète.
« Ses yeux surtout avaient une expression à la fois voluptueuse et farouche que je n’ai trouvée depuis à aucun regard humain. Œil de bohémien, œil de loup, c’est un dicton espagnol qui dénote une bonne observation. Si vous n’avez pas le temps d’aller au jardin des Plantes pour étudier le regard d’un loup, considérez votre chat quand il guette un moineau. »
Lire cette nouvelle, c’est, le temps d’y être, avoir un feu vif entre les mains. Pour cette fin d’été, quoi de mieux ?